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Comment apporter du raffinement à ton roman ? Les éléments

Pourquoi apporter du raffinement à ton roman ? Levons le rideau !

 

Bam ! Bam ! Bam ! Lever de rideau !

 

Ton entrée de roman peut être, comme au théâtre, un lever de rideau. Le rituel du théâtre est formidable. Tu prends une foule bigarrée, bruyante (la plupart du temps, les spectateurs ne se donnent plus la peine de se vêtir un peu mieux et de parler à mi-voix, et perdent ainsi beaucoup du charme qu’il y a à assister à une pièce de théâtre), prends donc cette foule désordonnée, éteins les lumières, et tape trois coups.

D’un coup, c’est le miracle : le silence se fait instantanément ! On devient attentif, on attend quelque chose. On a beau savoir ce qui va se passer, on attend avec respect. Même le plus mal éduqué des spectateurs ne résiste pas à ce charme. Quelques secondes de silence bien placées mettent le spectateur en état de recevoir.

Puis le rideau se lève lentement. C’est un deuxième délai durant lequel le silence s’approfondit. On devient attentif ; on oublie les autres, on est face à soi-même et face à la scène. En deux bouts de ficelle, on a créé un espace de concentration qui va durer une à deux heures. Quand on pense comme il est difficile de garder l’attention des gens dans une conversation plus d’une minute !

Les comédiens entrent enfin en scène. Ils se sont fait attendre ; on les désire. J’adore ce rituel bien huilé. Un rituel simple mais qui introduit une dose raffinement qui nous sort en quelques secondes du quotidien, nous prépare à recevoir une histoire qui nous éloigne de notre vie, et nous plonge dans un autre univers.

Je n’imagine pas le théâtre sans cela. Si on commençait la pièce en éteignant seulement les lumières, et hop ! les comédiens entrent en scène, il manquerait le mystère. Cela passerait peut-être pour le théâtre de boulevard, la farce, et encore. Pas pour une pièce plus sérieuse.

 

Crédit photo : Dieter_G

L’incipit contemporain

 

Pourquoi te parler de lever de rideau ?

Parce que j’ai la sensation aujourd’hui, de plus en plus, en littérature contemporaine, de débarquer dans le texte sans y avoir été invitée. C’est la volonté de l’auteur, me diras-tu, de débuter dans l’action franchement, sans préambule. Tu liras partout que le lecteur actuel n’a plus de temps à perdre, qu’il est débordé et que s’il lit, il en veut pour son argent : des faits, pas de littérature !

Mais de mon point de vue, la littérature sans littérature ! Non, non, il vaut mieux un bon fabricant de saucisson qu’un mauvais fabricant de romans. C’est mon point de vue, élitiste d’une certaine manière, et que je défends. D’ailleurs je préfère aussi les saucissons raffinés aux saucissons gossiers.

Alors parlons de cet incipit (début de roman) qui te précipite tout de go dans le crime, la dispute, l’action à tout prix. Je n’ai rien contre en soi. Je pense même que ça peut être très bien. Mais j’ai l’idée que ça peut être autrement aussi. Je ne crois pas au systématisme. Quand on écrit un livre, on n’est pas obligé de croire à la première idée venue, celle qui traîne partout : il faut commencer dans l’action pour ne pas perdre le lecteur.

Cela dépend. Il existe différents lecteurs, différents genres littéraires, différentes manières d’entrer dans l’action. Elle peut également être amenée plus lentement. On peut commencer par une description psychologique ou physique si c’est mieux pour ce récit. Si cela rend l’incipit plus attirant, plus cohérent avec le récit. Commencer par un dialogue. Par une réflexion. Une pensée. Un rêve. Autre chose.

On peut aussi entrer dans l’action dès la première phrase mais créer un espace sacré avant le récit à proprement parler. Ce peut être un poème qui ouvre le livre. Il va créer obligatoirement du silence et reconnecter le lecteur à lui-même comme au théâtre. Ce peut être par une citation. Elle jouera le même rôle.

On peut aussi envisager une préface qu’elle soit écrite pat l’auteur ou non, pourvu qu’elle ne révèle pas l’intrigue mais évoque subtilement l’atmosphère et provoque le désir de lecture.

On peut même envisager une carte, ou un dessin qui donnera aussi de l’appétence.

 

Crédit photo : Comfreak

 

Pourquoi l’écriture contemporaine manque-t-elle souvent de raffinement ?

 

Ces petits éléments de raffinement, je ne les vois plus guère en littérature contemporaine. Pourquoi ? Je n’en sais rien.

Mais j’ai une piste. Et si c’était parce que la grande tarte à la crème du siècle est de nous raconter sans cesse que nous sommes pressés, stressés, débordés ? Possible. Ou non. Pour vous, je ne sais pas.

Pour moi, ce n’est pas vrai : j’ai beaucoup à faire car je me suis offert le cadeau de me donner de nombreux objectifs dans ma vie, mais je n’ai pas la sensation de me trouver débordée et pressée. Non. Puisque c’est moi qui choisis mon existence. Cette tarte à la crème ne sert qu’à stresser les gens pour mieux les contrôler. Et cela fonctionne car la majorité des gens se croient tellement plus importants, tellement plus sérieux, plus intéressants, en se sentant surchargés ! Alors ils se donnent des contraintes inutiles, et s’arrangent pour faire de leur vie un enfer. Mais ils pourraient arrêter ce cirque en un claquement de doigts s’ils le décidaient !

Cette course éperdue pour avoir l’air occupé, c’est la rançon de vouloir absolument de la reconnaissance. Et quel genre de reconnaissance ? Et de la part de qui ? Ne vaut-il pas mieux avoir de la reconnaissance parce qu’on offre au monde notre petite quote-part, un petit quelque chose de valable plutôt qu’un grand brassage d’air ? Antoine de Saint-Exupéry décrit parfaitement ce processus ridicule :

La quatrième planète était celle du businessman. Cet homme était si occupé qu’il ne leva même pas la tête à l’arrivée du petit prince.

– Bonjour, lui dit celui-ci. Votre cigarette est éteinte.

– Trois et deux font cinq. Cinq et sept douze. Douze et trois quinze. Bonjour. Quinze et sept vingt-deux. Vingt-deux et six vingt-huit. Pas le temps de la rallumer. Vingt-six et cinq trente et un. Ouf! Ça fait donc cinq cent un millions six cent vingt-deux mille sept cent trente et un.

– Cinq cents millions de quoi ?

– Hein ? Tu es toujours là ? Cinq cent un millions de… je ne sais plus… J’ai tellement de travail ! Je suis sérieux, moi, je ne m’amuse pas à des balivernes! Deux et cinq sept…

– Cinq cent un millions de quoi ? répéta le petit prince qui jamais de sa vie, n’avait renoncé à une question, une fois qu’il l’avait posée.

– Cinq cents millions de quoi ?

– Hein ? Tu es toujours là? Cinq cent un millions de… je ne sais plus… J’ai tellement de travail ! Je suis sérieux, moi, je ne m’amuse pas à des balivernes ! Deux et cinq sept…

– Cinq cent un millions de quoi ? répéta le petit prince qui jamais de sa vie, n’avait renoncé à une question, une fois qu’il l’avait posée.

Le businessman leva la tête :

– Depuis cinquante-quatre ans que j’habite cette planète-ci, je n’ai été dérangé que trois fois. La première fois ç’a été, il y a vingt-deux ans, par un hanneton qui était tombé Dieu sait d’où. Il répandait un bruit épouvantable, et j’ai fait quatre erreurs dans une addition. La seconde fois ç’a été, il y a onze ans, par une crise de rhumatisme. Je manque d’exercice. Je n’ai pas le temps de flâner. Je suis sérieux, moi. La troisième fois… la voici ! Je disais donc cinq cent un millions…

Maintenant, soyons pragmatique et moins poétique. Faisons comme le businessman : parlons chiffres ! Ceci concerne la France.

 

Crédit photo : typographyimages

La réalité sur le temps passé au travail

 

Je sors du cadre pour cet article, je l’avoue. Je reviendrai au cadre, le raffinement dans le roman, ensuite. C’est que j’ai trop envie de pourfendre une idée reçue : on n’a plus le temps de rien ! Je l’entends trop et elle rabâchée par des gens qui passent leur vie à la perdre.

XVIIIème siècle : on travaille du lever au coucher du soleil tant qu’on y voit.

1841 : interdiction du travail pour les enfants de moins de 8 ans

interdiction du travail de nuit pour les enfants de moins de 13 ans

journée de travail limitée à 8 heures pour les 8-12 ans, à 12 heures pour les 12-16 ans

1848 : 10h/ jour à Paris et 12h/ jour en province

1900 : semaine de 70h, avec au plus 11h/jour (loi Millerand)

1906 : semaine de 60h

1919 : semaine de 48h (8h de travail, 8h de sommeil, 8h de loisirs, revendication du 1er mai 1886 à Chicago), décret d’application en 1926 !

1936 : semaine de 40h et deux semaines de congés payés (accords de Matignon)

1941 : semaine de 48h (charte du travail du gouvernement de Vichy)

1946 : semaine de 40h

1956 : 3 semaines de congés payés

1969 : 4 semaines de congés payés

1982 : semaine de 39 h et 5 semaines de congés payés

1997 : semaine de 35 h (travailler moins pour travailler tous), 5 semaines de congés payés et RTT

Jamais les gens n’ont eu autant de temps pour lire ! Et lire dans de bonnes conditions. Car avant, c’était une existence sans eau courante, gaz, électricité et quant à la médecine… Je sais que je vais à contre-courant de tout ce qui se dit et s’écrit. Mais la vérité est la vérité, et j’aime la vérité. Ce n’est pas moi qui la fais, ce sont les faits.

Bien sûr, le travail n’est pas merveilleux pour tout le monde et partout. J’ai vécu du surmenage ; j’ai fini par partir de ce travail qui m’épuisait. On n’est pas obligé de subir. C’est un choix que j’ai refusé. Refuser est un excellent choix parfois. Chacun prend ses responsabilités.

Donc si on veut absolument fournir aux gens de la littérature fast-food, des programmes télévisés fast-food, des films fast-food et de la cuisine fast-food, c’est volontaire : on dirige mieux un troupeau qui bêle que des animaux intelligents. Là où on ôte le raffinement, on ôte l’intelligence.

Un excellent roman peut bien entendu commencer tout de go, et dans l’action. Mais il peut également commencer comme au théâtre ou à l’opéra : avec lever de rideau.

 

Crédit photo : christels

Des éléments possibles pour raffiner ton roman

 

Il n’y a rien de systématique dans ma position. J’ai juste envie de te rappeler par cet article que tu peux user, si le cœur t’en dit, de tous ces éléments :

– La citation

– Le poème

– La préface

– Une pensée

– Une carte

– Un dessin

– Une photographie

– Un arbre généalogique

– Un remerciement

– Une dédicace

– La liste des personnage

– Un épilogue

– Un hommage

– Bref, ce que tu voudras.

Parce que l’intelligence sert à cela : faire des choix conscients. Et à user de créativité. L’intelligence sans création n’est qu’un leurre.

De la même manière, qui t’interdit de placer en tête de chapitre ou à la fin de ton roman un court poème, une citation, autre chose ? Au théâtre, le rituel se poursuit durant toute la pièce : sorties et entrées des personnages, entracte, rideau, salut des comédiens, rappels. Tu peux t’en inspirer. Et maintenant, baissons le rideau.

 

Crédit photo : Wounds_and_Cracks

 

Lire ou ne pas lire est un choix ; écrire ou ne pas écrire est un choix

 

Ah oui ! Tu l’as saisi, j’ai écrit également cet article pour rappeler à ceux qui racontent qu’ils n’ont pas le temps de lire que je n’en crois pas un mot ! Combien de temps passent-ils en discussions creuses avec leurs amis ou de vagues connaissances, à regarder la télévision, à la machine à café, à écouter des gens se plaindre et dire qu’ils sont dé-bor-dés ?

Et si tu remets l’écriture de ton roman depuis dix ans, penses-y également.

Il n’est pas certain que je me fasse uniquement des amis aujourd’hui…

Que ne ferais-je pas pour défendre le droit au raffinement en littérature, dans tous les arts et dans la vie même ! Merci au théâtre qui m’a inspiré cet article.

Qu’en penses-tu ? Je te donne rendez-vous dans les commentaires.

 

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